
Les moyens pour sortir de l'indivision
Il existe 3 solutions pour mettre un terme à l'indivision : la vente du bien en indivision, le partage de la masse de bien indivis ou encore la vente des parts d'un coindivisaire dans l'indivision.
Vente du bien en indivision
- Les coindivisaires mettent le bien en vente, puis se partagent le produit de la vente, proportionnellement à leurs parts respectives dans l'indivision.
- La vente provoque automatiquement la fin de l'indivision.
Partage de la masse de biens indivis
- Les coindivisaires partagent les biens entre eux, chacun se voyant attribuer un lot d'une valeur correspondant à ses parts dans l'indivision ; dès lors, chacun se retrouve seul propriétaire des biens qui lui sont attribués.
- Si les biens ne peuvent pas être répartis en lots de valeur correspondant aux parts respectives des coindivisaires, celui qui reçoit un lot d'une valeur inférieure à ses parts dans l'indivision peut demander une indemnisation, appelée « soulte », aux autres coindivisaires.
Vente des parts d'un coindivisaire dans l'indivision
Un coindivisaire peut souhaiter quitter seul l'indivision.
- Dans cette hypothèse, il peut seul mettre en vente ses parts dans l'indivision, les autres coindivisaires ayant un droit de préemption sur lesdites parts. Les autres coindivisaires restent en indivision entre eux – ou avec un tiers.
- Il est néanmoins rare qu'un tiers rachète des parts dans une indivision, dans la mesure où le tiers se retrouve alors à prendre des décisions communes avec des personnes qu'il ne connaît pas. Cette solution implique donc que les autres coindivisaires puissent racheter les parts de celui qui veut vendre.
À savoir : si les coindivisaires sont 2, la vente des parts de l'un peut provoquer la fin de l'indivision si les parts du vendeur sont rachetées par l'autre coindivisaire et non par un tiers.
Important : la répartition des droits de propriété sur un bien acheté en indivision se fait conformément aux quotes-parts indiquées dans l'acte d'acquisition et non en fonction du financement. Le fait que l'un des acquéreurs ait contribué plus que l'autre est sans incidence sur leurs droits de propriété respectifs : si deux acquéreurs achètent un bien en indivision chacun pour moitié, ils auront acquis la propriété dans la même proportion, sans qu’il ne soit tenu compte des modalités et sources de financement dudit bien (Cass. 1re civ., 10 janvier 2018, n° 16-25.190).
Règles de sortie de l'indivision
La loi prévoit que « nul n'est contraint de rester dans l'indivision » : cette règle permet aux coindivisaires de pouvoir sortir de l'indivision – situation juridique lourde – à n'importe quel moment et pour n'importe quel motif.
Important : si les coindivisaires concluent une convention d'indivision à durée déterminée, ils sont tenus de rester dans l'indivision pour toute la durée de la convention.
Concrètement, le coindivisaire qui souhaite sortir de l'indivision fait part de sa décision aux autres coindivisaires : si ces derniers souhaitent rester dans l'indivision, ils peuvent racheter les parts de celui qui veut vendre mais s'ils n'ont pas les moyens financiers, ils sont contraints de mettre un terme à l'indivision. Dans ces conditions, deux solutions : la voie amiable ou la voie judiciaire.
Voie amiable
- Les coindivisaires sont d'accord sur le principe et les modalités du partage ou de la vente des biens indivis.
- Dans ce cas, les coindivisaires procèdent eux-mêmes à la vente ou au partage ; l'opération nécessite néanmoins obligatoirement un écrit, l'acte liquidatif, rédigé par notaire.
Voie judiciaire
- Les coindivisaires sont en désaccord sur le principe et/ou les modalités de partage ou vente des biens indivis.
- Dans ce cas, n'importe quel coindivisaire peut saisir le tribunal judiciaire (ex-tribunal de grande instance) de sa demande ; le juge peut :
- imposer le maintien dans l'indivision, pour une durée maximale de 5 ans, si l'intérêt de l'un des coindivisaires le justifie ;
- procéder au partage des lots par tirage au sort ;
- si le partage est impossible, le juge peut ordonner la licitation des biens indivis : les biens sont mis en vente aux enchères.
À savoir : la voie judiciaire est longue et coûteuse, il est donc préférable de l'éviter si possible ; si un accord est trouvé entre les coindivisaires pendant la procédure judiciaire, les coindivisaires peuvent y mettre un terme et retourner à la voie amiable.
Sortir de l'indivision : le cas particulier de l'indivision successorale
Après le décès des deux parents, les héritiers se retrouvent ensemble propriétaires d’un patrimoine. Or, cette indivision n’est pas toujours facile à gérer. La loi, qui précise que « nul ne peut être contraint à demeurer dans l’indivision », prévoit plusieurs solutions.
Sortir de l'indivision successorale : le rachat de part
La première solution pour un indivisaire successoral qui ne souhaite pas rester dans l'indivision est de céder sa part aux autres héritiers. Dans cette hypothèse, l’indivision se maintient entre tous les indivisaires, et l'héritier sortant n'est plus concerné par la gestion du ou des biens dont il a hérité.
La vente d'un bien aux autres héritiers s'appelle en droit notarial une « licitation ». Dès lors qu’elle porte sur un bien immobilier, l'acte doit obligatoirement être passé devant un notaire, car il doit être publiée au Service de la publicité foncière (anciennement la Conservation des hypothèques).
Même si en pratique cela reste exceptionnel, il est également possible de vendre ses droits à un tiers plutôt qu’à sa fratrie, le tiers entrant alors en indivision avec les frères et sœurs de l'indivisaire sortant. Afin de protéger les héritiers, la loi les fait bénéficier d’un droit de préemption sur la part que l'héritier sortant déclare vouloir céder (art. 815-14 du Code civil). La Cour de cassation a rappelé dans un arrêt du 28 janvier 2009 (pourvoi 07-18120) qu'en cas de souhait de vente par un indivisaire de sa part à un tiers à l'indivision, l'héritier sortant doit notifier aux autres indivisaires, par voie d’huissier, le nom, le domicile et la profession de l’acquéreur pressenti. À défaut du respect de cette procédure, la vente pourrait être annulée. Dans le délai d’un mois après cette notification, tout indivisaire peut faire savoir à l'indivisaire sortant, par exploit d'huissier, qu’il souhaite exercer son droit de préemption aux prix et conditions notifiés. L’acte de vente doit alors être signé dans un délai de 2 mois à compter de la date d’envoi de la réponse. Lorsque plusieurs indivisaires exercent leur droit de préemption, ils sont censés acquérir ensemble la part de l'héritier sortant, chacun en proportion de ses droits dans l’indivision.
Sortir de l'indivision successorale : le partage amiable des biens
Si l’indivision porte sur plusieurs biens, il est possible de proposer un partage amiable de la succession : cette opération, qui consiste à répartir les biens entre les indivisaires en proportion de leurs droits dans l’indivision, impose l’accord de tous sur le principe et les modalités de partage.
Le partage amiable doit se faire en présence de l’ensemble des indivisaires. Toutefois, si l’un d’entre eux fait l’objet d’une mesure de protection juridique (tutelle, curatelle), ou s’il se trouve hors d’état de manifester sa volonté, ou encore s’il est mineur, le partage devra alors être autorisé par le juge des tutelles.
Avant de procéder officiellement au partage, les biens doivent être évalués. Ensuite, ils sont affectés à chacun des héritiers indivisaires en fonction de leurs droits dans la succession. Si un indivisaire reçoit un bien d’une valeur supérieure à ses droits, il doit verser aux autres une compensation financière : on appelle cette compensation une « soulte ».
Dès lors qu’un bien immobilier figure dans l’indivision, le recours à un notaire est indispensable. Ce dernier doit établir un acte liquidatif, qui détermine la part de chacun des héritiers indivisaires, ainsi que la façon dont elle est attribuée.
Sortir de l'indivision successorale : le partage judiciaire des biens
Est ici visée l’hypothèse d’une mésentente ou d’un désaccord sur la valeur des biens à partager. Dans ce cas, un partage judiciaire doit être réalisé, et c'est le tribunal judiciaire du lieu d’ouverture de la succession qui est compétent. Cette procédure nécessite obligatoirement le recours à un avocat.- L'héritier indivisaire doit déposer une assignation au tribunal judiciaire compétent, laquelle sera ensuite adressée par voie d’huissier aux autres indivisaires, accompagnée d’un descriptif sommaire des biens à partager.
- L’assignation doit indiquer pourquoi une solution amiable n’a pas pu aboutir : en pratique, le notaire établit un procès-verbal de difficultés, qui permet au juge d’avoir une vision précise de la situation.
- Le tribunal judiciaire nomme ensuite un nouveau notaire, lequel sera en charge des opérations de liquidation et de partage de l'indivision. Cet officier public est souvent commis d’office par le juge en cas de désaccord entre les indivisaires. Lorsque le patrimoine est difficilement partageable, l’opération peut nécessiter la vente du ou des biens indivis aux enchères : c’est très souvent le cas en pratique lorsque le partage porte sur un bien immobilier.
Il arrive encore à ce stade que l’un des coïndivisaires refuse de procéder à la vente : dans ce cas, le notaire commis aux opérations de partage judiciaire dresse un procès-verbal de difficultés qui sera transmis à un juge-commissaire. Ce dernier établit sur la base du procès-verbal un rapport destiné au tribunal, proposant de faire procéder :
- soit à l’attribution préférentielle du bien : le juge attribue le bien à un héritier qui le souhaite, à charge pour lui de verser une soulte aux autres ;
- soit à la vente aux enchères du bien à la barre du tribunal. Après la vente, le notaire dresse l'acte liquidatif indiquant la répartition du prix de vente entre les héritiers.